Nicolas Villain

Chercheur principal dans la chaire « Anticiper la maladie d’Alzheimer » soutenue par le Fonds AXA pour la recherche

La maladie d’Alzheimer est un problème majeur de santé publique reconnu par tout le monde, qui concerne malheureusement chacun d’entre nous au premier ou au deuxième degré.

Nicolas Villain est maître de conférences en neurologie à Sorbonne Université et praticien hospitalier (MCU-PH) au sein de l’Institut de la mémoire et de la Maladie d'Alzheimer (IM2A). Il a récemment rejoint une équipe de recherche à l’Institut du Cerveau pour étudier les biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer dirigée par le Pr. Kaj Blennow, leader mondial de la recherche sur les biomarqueurs de la maladie d'Alzheimer. Ce projet est soutenu par le Fonds AXA pour la Recherche. 

Parlez-nous de votre parcours, comment en êtes-vous arrivé à devenir le principal investigator dans ce projet ?

J’ai très tôt embrassé un double cursus médecine-sciences au travers de l’école de l’Inserm-Liliane Bettencourt où je me suis spécialisé dans la maladie d’Alzheimer, notamment à travers l’étude multimodale de biomarqueurs de neuroimagerie de la maladie à la fin des années 2000 à Caen, dans l’équipe de la Dre Gaël Chételat. J’ai ensuite poursuivi ma formation médicale puis réalisé un internat et clinicat de neurologie à Paris, à l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, dirigé par le Pr Bruno Dubois tout en menant des projets de recherche ayant trait à la neuroimagerie de la maladie d’Alzheimer.

Plus récemment, afin de suivre la montée en puissance des biomarqueurs fluidiques, je me suis formé à l’analyse spectrométrique des fluides humains (tels le liquide cérébrospinal et le plasma) au sein du Laboratoire innovations en spectrométrie de masse pour la santé dirigée par le Dr François Fenaille au CEA de Saclay. Quand l’opportunité s’est présentée de lancer une équipe de recherche à l’Institut du Cerveau centrée sur l’étude des biomarqueurs fluidiques de la maladie d’Alzheimer sous l’impulsion du Pr Kaj Blennow, sommité mondiale sur le sujet, cela s’articulait parfaitement avec ma formation médicale et scientifique ainsi qu’avec mes projets scientifiques : cela était une évidence de faire partie du projet.

Pouvez-vous expliquer en quoi consiste votre projet de recherche sur la maladie d’Alzheimer, quels en sont les principaux objectifs ?

Le projet à un double objectif. Une dimension clinique qui consiste à développer de nouveaux biomarqueurs fluidiques de la maladie d’Alzheimer et de tester ensuite leur valeur diagnostique et pronostique au sein des cohortes de patients à notre disposition. Une dimension mécanistique plus fondamentale qui vise à comprendre les liens entre les biomarqueurs et les mécanismes biologiques de la maladie au travers d’études avec des modèles murins.

Quel impact devrait avoir l’arrivée de Kaj Blennow sur ce projet ? Quelles en sont les prochaines étapes ?

Kaj Blennow est à la fois le pionnier et le leader mondial de la recherche sur les biomarqueurs fluidiques de la maladie d’Alzheimer. Il a aujourd’hui 3 026 publications citées 152 889 fois, avec un h-index de 179, ce qui est remarquable. Il a dans les années 1990 mis au point les premiers immunodosages des protéines tau et ABeta dans le liquide cérébrospinal et continue aujourd’hui à être le leader mondial du développement de nouvelles méthodes. Il a, à la fois le leadership, les connaissances et les expériences scientifiques et managériales nécessaires pour faire aboutir ce projet mais également les connexions avec les industriels impliqués dans ces développements. Son temps est précieux mais son impact est capital. Les prochaines étapes consistent à démontrer notre capacité à mener à bien ce projet et ensuite le pérenniser à plus long terme, dans un environnement médico-scientifique mondial extrêmement dynamique.

En quoi ce projet est-il innovant et quel impact aura-t-il sur la maladie d’Alzheimer à l’avenir ?

L’arrivée des techniques d’immunodosages de deuxième génération et des techniques de spectrométrie de masse haute résolution ont récemment permis de rendre possible le dosage de biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer dans des fluides humains plus facilement accessibles comme le plasma, quand ils n’étaient jusqu’à présent disponibles que dans le liquide cérébrospinal au travers d’une ponction lombaire. Les biomarqueurs actuellement validés terminent leurs dernières étapes avant de pouvoir être utilisés en routine clinique. Notre équipe se singularise par sa volonté de travailler étroitement en lien avec des objectifs cliniques pronostiques : les biomarqueurs actuellement identifiés sont excellents pour identifier les lésions cérébrales de la maladie d’Alzheimer qui sont malheureusement très fréquentes dans la population générale après 60 ans.

Nous avons l’ambition de mettre au point des biomarqueurs qui permettront d’établir un pronostic fiable quant au risque de déclin ultérieur chez les individus asymptomatiques qui présentent les lésions de la maladie. Cette caractérisation du pronostic est capitale pour mieux cibler les individus les plus à même de bénéficier de tels traitements alors que des essais préventifs avec des thérapies risquées et complexes commencent à voir le jour. Comprendre également la signification de ces biomarqueurs dans la cascade biologique responsable de la maladie est capitale notamment avec l’arrivée des nouvelles thérapies. Notre second objectif est donc d’améliorer notre connaissance des liens entre mécanismes de la maladie et ces biomarqueurs, afin de mieux identifier in vivo les mécanismes de la maladie et d’aboutir à une médecine personnalisée de la maladie d’Alzheimer.

Quel message voudriez-vous faire passer au mécène pour son soutien dans ce projet ? En général, quel message voudriez-vous transmettre aux mécènes qui s’engagent dans la recherche pour la maladie d’Alzheimer ?

Avant tout ma sincère reconnaissance. La maladie d’Alzheimer est un problème majeur de santé publique reconnu par tout le monde, qui concerne malheureusement chacun d’entre nous au premier ou au deuxième degré. Son importance ne cesse de croître, dans un anti-parallélisme peu flatteur avec les progrès thérapeutiques faits dans le cancer et les maladies cardio-vasculaires. Nous sommes très heureux que le Fonds AXA pour la Recherche l’ait également identifié parmi ses priorités.

La recherche mondiale sur la maladie d’Alzheimer avance entre autres grâce à l’implication de mécènes comme le Fonds AXA pour la Recherche qui permettent de maintenir la France dans la course contre cette maladie, et de faire valoir ses singularités comme l’excellence de sa formation et l’originalité des solutions, au profit des malades. Cette originalité est capitale puisque nous faisons face à une maladie complexe, encore imparfaitement comprise. Le mécénat pèse de plus en plus lourd dans les progrès de la recherche sur cette maladie, avec l’exemple outre-Atlantique où d’importants financements de fondations privées permettent d’engager des programmes de recherche originaux et ambitieux. C’est cette ambition et cette originalité au service des malades et de leurs proches que nous souhaitons également mettre en place avec ce programme.

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