DominiqueMazier

Dominique Mazier

Professeure émérite

3,2 milliards de personnes – soit près de la moitié de la population mondiale – sont exposées au risque de contracter le paludisme

Médecin-chercheuse en immuno-parasitologie, Dominique Mazier, étudie actuellement au sein du Centre d'Immunologie et des Maladies Infectieuses (Sorbonne Université / Inserm / CRNS) l’utilisation de deux plantes originaires de Chine et d’Afrique du Sud, l’Artemisia annua et afra, sur les différents stades de développement de la malaria. Ce projet, soutenu par la Fondation Sorbonne Université et l’association Maison de l’Artemisia ouvre la perspective de découvrir de nouveaux composés antipaludiques.

Parlez-nous de votre parcours et de ce qui vous a amené à travailler sur le paludisme ? 


J’ai débuté mon parcours comme médecin « sur le terrain » au Mali et en Ethiopie, puis comme médecin de campagne dans le Gers. Je me suis ensuite orientée vers une carrière hospitalo-universitaire. Dans ce cadre, j’ai dirigé le Service de Parasitologie-Mycologie de la Pitié-Salpêtrière à Paris et successivement trois unités INSERM. Mes recherches portent sur les parasites et les champignons pathogènes pour l’homme, avec une part importante consacrée au parasite du paludisme (ou malaria). En explorant les mécanismes fondamentaux de l’infection qu’ils engendrent, mes travaux visent à développer de nouveaux concepts de recherche, ainsi que leurs applications thérapeutiques. 

Que représente l’épidémie de paludisme aujourd’hui ? 

Le paludisme, causé par le parasite Plasmodium transmis par la piqure d’un moustique, reste un problème majeur de santé publique en dépit des moyens mis en œuvre pour son éradication : 3,2 milliards de personnes – soit près de la moitié de la population mondiale – sont exposées au risque de contracter le paludisme. En 2019, 229 millions développent la maladie et 409 000 en meurent, principalement des enfants de moins de 5 ans vivant en Afrique subsaharienne. Les efforts de la communauté internationale ont cependant permis une diminution de 60 % de la mortalité en 15 ans.

Votre projet s’appuie sur l’utilisation de deux plantes originaires de Chine et d’Afrique du Sud, l’Artemisia annua et afra, pouvez-vous nous en dire plus ? 

La découverte de l’artémisinine par Youyou Tu, prix Nobel de Médecine en 2015, a joué un rôle capital dans la réduction du nombre des décès dus au paludisme. L'artémisinine, purifiée à partir de la plante Artemisia annua, est en effet un des antipaludiques les plus puissants connus à ce jour et les associations thérapeutiques à base d'artémisinine sont actuellement les seuls traitements de première intention efficaces contre le paludisme. Cependant, depuis 2008, l’émergence de parasites résistants aux associations thérapeutiques à base d’artéminisme dans le Sud-Est asiatique représente une menace très importante pour la santé publique dans les régions d'endémie palustre.
Les efforts visant à empêcher l'émergence de la résistance à l'artémisinine en Afrique, où le parasite est le plus répandu, vont de pair avec les efforts visant à découvrir de nouvelles classes de médicaments antipaludiques. Il s'agit également de trouver de nouveaux médicaments sûrs qui peuvent empêcher les rechutes dues aux stades hépatiques dormants. Il s’agit d’une fraction de parasites, appelés hypnozoïtes, qui peut rester « dormante » un an ou plus, avant de se réveiller, provoquant une rechute. 

Quels sont les objectifs de votre projet ? Comment pourraient se traduire les recherches développées grâce à votre approche ?

Au cours des dernières années, s’est mise en place une campagne de plus en plus forte pour préconiser, comme traitement mais aussi de façon préventive, l'utilisation généralisée des remèdes traditionnels à base d’Artemisia : A. annua, mais également A. afra, espèce traditionnellement utilisée en Afrique du Sud et dépourvue d'artémisinine. Cela a valu la forte désapprobation de l'Organisation Mondiale de la Santé, qui considère que l'utilisation de tels traitements non supervisés, favoriserait l'émergence d'une résistance aux médicaments.
Notre projet, à l’aide de différents modèles mis au point dans notre laboratoire consiste en l’étude comparative de l'activité des infusions d’Artemisia annua (riche en artémisinine) et d’Artemisia afra (sans artémisinine) sur différents stades de développement du parasite dont ceux qui forment des hypnozoïtes (les stades hépatiques dormants qui provoquent des rechutes). Les premières données démontrent clairement une puissante activité inhibitrice, indépendante de l’artémisinine. 
Ces premiers résultats ouvrent la perspective de découvrir de nouveaux composés antipaludiques, notamment un qui serait efficace pour prévenir les rechutes qui entravent le contrôle du parasite. 
 

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Crédits : Inserm