SorbonNum
  • Science, culture et société

La numérisation au service du patrimoine de Sorbonne Université

Depuis 2019, la Bibliothèque de Sorbonne Université s'est engagée dans un projet de numérisation de ses collections documentaires patrimoniales, sous la houlette du département des collections de la bibliothèque. Cette initiative vise à conserver et valoriser le patrimoine scientifique et culturel de l’université, afin de  répondre aux besoins de la recherche, mais aussi de rendre accessible au grand public ce patrimoine très riche, mémoire de l’établissement.

« À mon arrivée, en 2019, les projets de numérisation étaient à l’arrêt depuis cinq ans. Nous avons donc commencé par faire un état des lieux de ce qui avait été fait et comment », se souvient Adeline Batailler, adjointe au responsable du département des collections de la bibliothèque de Sorbonne Université et en charge de la numérisation.

Rénover l'infrastructure de numérisation

Afin de remplacer une infrastructure vieillissante, la bibliothécaire et son équipe ont opté pour NumaHOP, un logiciel libre de gestion de contenus numérisés conçu pour centraliser et rationaliser l'ensemble du processus de numérisation. « L'un des avantages majeurs de cette plateforme réside dans l’automatisation d’une dizaine de tâches auparavant effectuées manuellement avec plusieurs outils. Cette automatisation a permis de libérer un temps précieux pour se concentrer sur l'essentiel : la préservation et la valorisation des documents et des données, explique Adeline Batailler. Les équipes de la bibliothèque ainsi que les différents partenaires extérieurs  (de numérisation, d’archivage et de diffusion sur la bibliothèque numérique) ont désormais accès à une interface commune, facilitant leur collaboration et leur coordination ».

Une variété de documents, témoins de l’Histoire

Parmi les documents numérisés, se trouvent des monographies et des périodiques anciens, mais aussi des fonds d’archives de personnalités importantes, des fonds iconographiques, des partitions… Tout ceci offre un aperçu de l’étendue et de la richesse des collections de l’université.

L'un des projets emblématiques, fruit d’une collaboration de plusieurs institutions et services et qui a nécessité plus de deux ans de travail, concerne les archives de Henri de Lacaze Duthiers, biologiste marin, enseignant et fondateur des stations marines de Sorbonne Université. « C'est un fonds extraordinaire », se réjouit Adeline Batailler. Ces archives comprennent des correspondances avec les hommes et les femmes de son temps, des cours et des conférences, mais aussi des photographies, des croquis et des aquarelles très bien conservés. Ces documents, qui ont fait l’objet d’une exposition à la bibliothèque BCPR début 2024, offrent un témoignage de l'évolution de la science au 19ᵉ siècle par un scientifique qui a marqué son temps.

 

Extrait de Correspondance de Léon Fredericq et Henri de Lacaze-Duthiers

Extrait de Correspondance de Léon Fredericq et Henri de Lacaze-Duthiers

D'autres trésors sont également numérisés : partitions musicales du XVIIe siècle, photographies historiques documentant la construction du campus Pierre et Marie Curie, correspondance privée de George Sand avec son ami peintre Eugène Lambert, etc. En 2023, ce sont plus de 40 000 images librement accessibles et réutilisables qui ont été numérisées, offrant une fenêtre sur le passé à la communauté universitaire et au grand public.

Dans les coulisses

Pour arriver à ce résultat, les membres de l’équipe du département des collections, le SARA (Service des Archives et du Recueil des Actes) et les bibliothèques réalisent au quotidien un travail de longue haleine. « Nous sélectionnons les documents en fonction de leur intérêt scientifique, de leur pertinence par rapport à la politique documentaire de la BSU, de l’état des documents nécessitant une préservation et des projets spécifiques des différentes bibliothèques », explique la bibliothécaire. Cette sélection est ensuite affinée voire amendée par des enseignants-chercheurs spécialistes du sujet.

Une fois sélectionnés, les documents sont envoyés, si nécessaire, en restauration, avant d’être signalés et décrits dans des catalogues nationaux (SUDOC pour les imprimés, Calames pour les archives). « Avant de les transmettre au prestataire, nous vérifions toutes les données bibliographiques et faisons un constat d'état, une description de l'état physique des documents. Les documents sont ensuite numérisés par un prestataire, et nous recevons, via la plateforme NumaHOP, les fichiers en haute définition. Nous les transférons au Centre informatique national de l'enseignement supérieur (Cines), l’opérateur national pour l’archivage des données et des documents numériques produits par les établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche. Nous assurons ainsi la pérennité des fichiers et des données », ajoute Adeline Batailler.

Les fichiers numériques accessibles sur la bibliothèque numérique de Sorbonne Université, SorbonNum, lancée en 2021, sont eux plus légers et bénéficient d’une description enrichie. Les documents imprimés sont également océrisés. L’équipe du département des collections s’emploie à harmoniser les données pour les rendre interopérables avec d’autres outils et y ajoute des métadonnées (description, lieu de production, liens vers les documents papier, etc.).

La collaboration au cœur du processus

Dans ce projet, la collaboration avec les bibliothèques, les archivistes du service des archives et recueil des actes (SARA) mais aussi les enseignants-chercheurs est indispensable. Cette coopération permet de garantir que les documents sélectionnés pour la numérisation répondent aux besoins de la communauté universitaire et correspondent aux priorités institutionnelles.

 « En 2023, nous avons, par exemple, numérisé la correspondance privée de de George Sand avec son ami Lambert, en partenariat avec la bibliothèque Ascoli-Paul Hazard. Et actuellement, nous travaillons avec la bibliothèque d’études anglophones pour la numérisation d’un corpus d’ouvrages anciens de littérature victorienne ». Engagé dans une cartographie documentaire, le département des collections se rend régulièrement dans les bibliothèques pour inventorier les collections. Souvent, il trouve de nouvelles pépites. « Nous avons notamment découvert, à la bibliothèque Malesherbes un fonds d’archives d’Edmond Vermeil, enseignant de l’Université de Paris au début des années 30, qui fut saisi par le gouvernement de Vichy et envoyé à Berlin, puis à Moscou après la guerre. Traitées en URSS, les archives nous sont revenues inventoriées dans les années 60 », raconte Adeline Batailler.

Parmi les projets de numérisation à venir, la numérisation de cartes géologiques, d’ouvrages anciens de littérature victorienne et les registres de la station de Wimereux promettent d'enrichir encore davantage les collections numériques de l'université.

 

Extrait de Arethuse ou La vengeance de l'amour, par André Campra et Antoine Danchet, p. 9

Extrait de Arethuse ou La vengeance de l'amour, par André Campra et Antoine Danchet, p. 9

Vers un avenir numérique pérenne

Afin d’assurer la pérennité de ce patrimoine pour les générations futures, des projets techniques d'envergure sont en cours. C’est notamment le cas de l'amélioration de l'interopérabilité avec d'autres plateformes, comme Gallica, la bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France, ou Flora, la future base d’inventaire des collections scientifiques et patrimoniales de Sorbonne Université, qui diffusera notamment des spécimens de paléontologie, de paléobotanique, ou de pétrologie. « À terme, SorbonNum et Flora auront la même identité visuelle afin de créer un écosystème numérique cohérent et interconnecté », précise l’adjointe. Ces initiatives visent également à garantir que les documents numérisés restent accessibles et exploitables dans les années à venir, quelles que soient les évolutions technologiques.

Adeline Batailler, adjointe au responsable du département des collections de la bibliothèque de Sorbonne Université et en charge de la numérisation.

Adeline Batailler